Musique de chambre aux fenêtres ouvertes
Programmation 2005
De l'Europe centrale à l'Europe de l'Est, le Festival Sine Nomine 2005 se construit autour d'une thématique forte et volontairement vivante, en lien avec l'actualité.
Le programme s'élabore autour de compositeurs polonais, tchèques, hongrois et roumains, avec des incursions en Ouzbekistan, Allemagne et Autriche. C'est l'occasion de réunir des oeuvres qui ne sont habituellement pas juxtaposées, qui s'éloignent des programmes conventionnels de musique de chambre, pour susciter la réflexion et donner des repères que le public apprécie : la construction cohérente de ces concerts permet de suivre les traces d'un individu créateur ou d'une culture. Ainsi, avec le XIXe siècle finissant et les débuts du XXe, la production de quatuors est marquée par la création d'oeuvres inspirées de courants opposés. L'un plutôt minoritaire, s'inscrivant toujours dans la grande tradition viennoise, l'autre cédant à une attirance pour les cultures populaires ou l'exotisme.
Un vent venu de l'Est ébranle ainsi la suprématie viennoise, mais sans pour autant remettre en question la forme et le langage du quatuor classique. Ce courant possède une qualité particulière et primordiale : tous ses grands compositeurs, sans exception, se sont inspirés de manière substantielle de la musique populaire. Il s'agit d'une musique avec un regard sur les rues, sur les campagnes : une musique de chambre aux fenêtres ouvertes, en quelque sorte. Une telle recherche obéit à des besoins profonds de renouvellement harmonique et stylistique; de simplicité, en réaction à une écriture de plus en plus complexe.
Une soif d'humanité. Bartok dira « Nous devons avoir un grand désir de vivre et porter un grand intérêt à l'univers existant. ». Dans cet esprit, Bartok mène ses recherches ethnomusicologiques et parcourt les villages de nombreux pays il va jusqu'en Afrique à la rencontre des paysans pour les entendre jouer, chanter et les voir danser. Il réalise plus de 5'000 enregistrements, observant aussi la nature sauvage pour l'imiter de façon saisissante dans sa musique.
Des années de recherche, de classement et d'analyse lui permettront de remonter aux origines de la musique populaire de ces pays. Janacek écoute le parlé et les cris des gens dans la rue, capte les intonations et les transforme en musique. Quant à Dvorak, Oskar Sourek disait de lui « qu'il n'harmonise ni stylise comme le fait Brahms des mélodies populaires originales, mais il idéalise, quant à la forme et au contenu, les danses populaires». Dans ce sens, on évoque aussi le folklore imaginaire de Bartok.
Cet esprit de fraîcheur est resté présent jusqu'à aujourd'hui et a permis l'éclosion d'oeuvres magnifiques, traitées avec plus de sensibilité et peut-être moins de crispation qu'ailleurs.